Le 9 janvier 2025, le groupement de Walungu, dans le Sud-Kivu, a été frappé par une violente pluie de grêle, détruisant en quelques heures des centaines d’hectares de cultures vivrières. Manioc, maïs, patates douces : tout a été broyé, y compris les espoirs de nombreuses familles. Le chef traditionnel, Badi Barhigenga, témoin direct de la scène, témoigne avec émotion : « C’était comme si le ciel lui-même s’écroulait. Nous avons vu disparaître sous nos yeux le fruit de mois de travail. » Ce n’était malheureusement pas une première pour Walungu. En 2020, une catastrophe similaire avait provoqué deux années de disette dans la région. Mais entre-temps, la communauté avait appris. Forte des leçons du passé, elle s’était organisée, préparée, et avait entamé un véritable mouvement de résilience porté par la solidarité et la vision à long terme.
Grâce à des mois de travail collectif, plus de 100 000 arbres avaient déjà été plantés : 70 000 agroforestiers (acacias, cèdres, grevilleas) et 30 000 fruitiers (pruniers, maracujas, citronniers…).Ces plantations ne sont pas de simples réponses environnementales : elles incarnent une vision. À travers ce programme, la Fondation Mutijima et les communautés locales veulent restaurer les sols, réduire l’érosion, créer des microclimats, et renforcer la souveraineté alimentaire. Trois pépinières communautaires servent de base à cette stratégie. Les résultats sont là : la dernière récolte de haricots, engrangée juste avant la grêle, a évité une nouvelle crise alimentaire. Une réussite due à l’adoption de cultures à cycle court comme le soja, les pommes de terre ou le taro, plantées en parcelles diversifiées à haut rendement.
La communauté ne s’arrête pas là. Un dialogue a été engagé avec les autorités locales pour accéder à 4 000 hectares de terres non cultivées, répartis dans 44 villages. Objectif : reboiser l’ensemble du territoire de Walungu d’ici à 2045. Un projet ambitieux qui mise sur la coopération, l’éducation et la vision à long terme.
Outre le reboisement, les actions se multiplient. De nouvelles pépinières sont en cours d’aménagement pour produire des plants maraîchers à cycle court, assurant une sécurité alimentaire même en cas d’intempéries.
Autre innovation : la culture communautaire de l’amarante, une plante nutritive et rentable. Les revenus générés permettent de soutenir financièrement les animateurs des programmes éducatifs d’inspiration bahá’íe. Ce lien entre agriculture et éducation crée un modèle de résilience intégrée : économique, sociale, et spirituelle.
La Fondation Mutijima ne se contente pas de distribuer des semences. Elle forme, accompagne, et construit des ponts. Avec les autorités traditionnelles, les leaders religieux, les jeunes et les femmes, elle impulse une véritable mobilisation sociale. Chaque acteur est impliqué dans la construction d’une vision partagée.
Cette approche est fondée sur une conviction forte : la justice environnementale est indissociable de la justice sociale. À Walungu, cette idée prend racine dans les champs, les écoles, les cercles de discussion. Elle devient vivante.
À travers ces efforts, Walungu devient une source d’inspiration pour d’autres régions du Congo et au-delà. Face à l’urgence écologique, la communauté a démontré qu’une réponse locale, structurée et collaborative est possible. Elle montre qu’un développement durable ne passe pas uniquement par des politiques nationales ou internationales, mais aussi par l’initiative citoyenne et communautaire.
Ce projet repose sur des principes spirituels issus de la foi bahá’íe, qui mettent en avant l’unité, la justice, la consultation, et la responsabilité individuelle et collective. Ces valeurs permettent aux habitants de Walungu de rester unis dans l’épreuve et de transformer chaque crise en opportunité de croissance.
L’histoire de Walungu est celle d’une transformation silencieuse mais profonde. Une communauté autrefois frappée par l’insécurité alimentaire, la déforestation et les catastrophes naturelles, bâtit désormais un avenir résilient, enraciné dans la coopération et le respect de la nature.
À Walungu, chaque arbre planté est une déclaration de foi en l’avenir. Chaque jeune formé, chaque semence semée, chaque réunion tenue autour d’un projet collectif est une victoire contre le fatalisme. C’est une promesse faite à la prochaine génération : celle de vivre dans un environnement plus sain, plus juste, et plus solidaire.